04/10/2013

Miaw 9 - Chez Man


9
Chez Man



Ce n'est que le soir qu'elle comprit que Coralie ne reviendrait pas ; à l'heure du repas. Minette avait cherché Coralie partout, affamée. Elle l'avait appelé, mais Coralie n'avait pas répondu. Et puis la vieille humaine l'avait prise, par surprise, lui enserrant le ventre et l'emportant, vers une gamelle remplie de cailloux mous, à l'odeur nauséabonde. Minette avait pincé le nez puis, libérée, était repartie à la recherche de son humaine. Elle était allée à la porte, là où son odeur était la plus fraîche. Elle avait attendu, longtemps... puis les humains d'ici avaient éteint leur lumière. Elle avait eu faim, si faim... Mais Coralie n'était pas revenue. Elle avait dormi, le ventre gargouillant. Le jour suivant, la vieille humaine l'avait de nouveau portée et posée devant la gamelle de cailloux. Minette avait protesté que ce truc sentait mauvais. Puis elle avait vu l'eau, à côté. Coralie lui en donnait toujours, en même temps que son Manger. Alors, au cas où, elle avait goûté aux cailloux ; la vieille humaine avait souri : apparemment, c'est ce qu'elle voulait que Minette mange. Ce n'était pas bon, mais elle avait trop faim.

Elle avait englouti les cailloux, avec quelques gouttes d'eau. 

C'était il y a trois nuits. Plusieurs repas, tous à base de cailloux, s’étaient passés depuis que Coralie l’avait abandonnée là. Elle avait fini par comprendre : c’est Man qui lui donnait toujours à manger, à présent, à chaque repas. On mangeait mieux chez Coralie, mais plus souvent ici. Il y avait toujours la gamelle remplie, chez Man. Autres humains, autres règles... et autres mœurs : contrairement à Coralie, Man était presque tout le temps présente, prête à la caresser, et quand elle n’était pas là, c’était le vieil humain, qui regardait la boite à lumières, assis sur le canapé. Il y avait toujours un humain, ici, pour s’occuper d’elle quand elle en avait envie : Man ou « Raymond » - ainsi l’appelait Man ; Minette avait facilement compris que c’était le son le désignant.

Minette ronronne sur les genoux de Man. Wof est allongé aux pieds de Raymond. Minette n’avait pas spécialement sympathisé avec Wof, mais elle avait fini par comprendre que Man et Raymond lui interdisaient de l’approcher. Il l’avait tenté plusieurs fois, pourtant. La deuxième nuit, tandis qu’elle mangeait tranquillement, il avait couru vers elle en wofant. Elle avait sursauté, craché, puis sauté sur le mur, bondi sur la table, cogné un verre qu’il y avait là, puis couru encore, tandis que l’autre la suivait ; jusqu’à ce que Minette passe entre les jambes du vieil humain et que ce dernier attrape Wof, lui mette quelque chose au cou et l’emporte dehors. Là, Minette avait pu retourner manger. D’ailleurs, Raymond sortait souvent Wof ; au moins deux fois par jour. Elle s’était demandée pourquoi, la première fois, la seconde fois aussi, mais à la troisième sortie, elle s’était seulement dit qu’elle serait seule pendant ce temps ; et que c’était tant mieux.

Hier encore, Wof avait essayé de l’ennuyer ; mais Minette savait désormais quoi faire : elle allait voir un humain, puis Wof était emporté ailleurs. Cette technique fonctionnait à tous les coups ; alors, Wof ne l’embêtait plus et, quant à elle, elle n’en avait plus peur. Ce qui ne l’empêchait pas de continuer de le surveiller...

Man caresse Minette, lentement, sans y penser, dans le cou. Et c’est bon. C’est drôlement bon. Wof remue, se lève. Minette ouvre à demi un œil, le surveille. Il tire la langue, halète et regarde Minette. Jappement d’invite de Wof. Grondement ronflant de Minette. Appel au calme des humains. Minette signifie que c’est Wof qui a commencé. Wof dit quelque chose, mais personne ne le comprend ; ni Minette, ni les humains : Wof est tiré en arrière, Minette est caressée. Wof se plaint ; enfin, a priori. Minette ferme les yeux. Wof... fait « Wof », tandis que l'humain le sort de la pièce.

Minette ronronne. Man la caresse. Raymond éloigne Wof. 

Tout va bien.

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