07/02/2014

Miaw 15 - Le moustique

15
Le moustique.


Les jours passent, comme les repas. Sa douleur et sa tristesse se calment, s'oublient. L'humain géant est de plus en plus souvent là. Coralie et lui sont dans la chambre, en ce moment, à se crier dessus. Ils ont fermé la porte.


Minette a mal aux griffes, elles sont trop longues ; alors, elle les gratte ; sur ce truc à la fois ni trop dur et ni trop mou. Elle ne peut le faire que quand son humaine ne la voit pas ; autrement, elle l'en empêche, en grondant. Ça fait partie de ces interdictions idiotes que Coralie voudrait lui imposer. Quel mal y-a-t-il à se réduire les griffes ? Son humaine ne sait pas à quel point c'est douloureux, quand elles sont longues ! Ces bêtes verticales sont stupides, en plus d'être incompréhensibles.

Lorsqu'elle est satisfaite, elle descend du canapé et va à sa flaque d'eau. Elle y trempe plusieurs fois sa langue. De là, elle entend un de ces agaçants intrus volants ; un moustique. Il zonzonne, pas loin. Reste à savoir où. Elle cherche donc des yeux. Il est sur le mur. Minette s'en approche doucement, en pattes douces. Elle est dessous, à présent, et se prépare à bondir. Elle plie ses pattes arrière, puis attend. Il faut que le moustique s'envole un peu ; ce n'est pas si facile quand ils sont posés ; elle a déjà raté plusieurs fois. Et puis, c'est plus rigolo quand ils sont en l'air.

Ça y est ! Il bouge ! Elle saute ! Un mètre plus haut, elle tape ses deux pattes avant. Zut ! Un centimètre trop à droite ! Minette retombe et le moustique s'en va... Elle le suit, au ras du sol, sans le perdre de vue. Elle l'aura ; cela prendra le temps qu'il faudra, mais elle l'aura.

Il se repose sur la porte de chambre, alors Minette se place dessous, et se prépare de nouveau. Un long moment. Le moustique ne semble pas décidé à bouger. Mais Minette ne le quitte pas des yeux.

Puis la porte s'ouvre, vers l'intérieur de la chambre, et le moustique s'envole ; alors, elle bondit vers sa proie. Elle n'a pas vu l'humain. Comment a-t-elle pu ? Ce n'est qu'une fois en l'air qu'elle remarque le géant, nu. Elle lui retombe sur la poitrine, mais se retourne aussitôt, et se propulse en arrière, poussant de ses pattes sur son torse poilu. Elle n'avait jamais vu un humain avec tant de poils ici. Elle court, se cache sous le canapé puis se retourne. Le géant est en train de rire. Puis il dit quelque chose à Coralie, qui rit à son tour.
Elle regarde la main de l'humain. Il porte quelque chose. Qu'est-ce que c'est ? Ça sent fort, mais c'est en plastique ; normalement, ça n'a pas d'odeur, ça... du moins, les exceptions sont rares. Et c'est souvent à cause de ce qu'il y a dedans, comme les déchets d'humains. Le géant va dans la cuisine, puis en ressort avec une bouteille de lait, qu'il boit, mais sans le petit sachet à l'odeur curieuse. Il retourne dans la chambre avec sa bouteille, sans fermer la porte.

Minette hésite : regarder dans la chambre, pour savoir ce que font les humains, ou bien suivre l'odeur ?
Elle décide de faire les deux. Elle passe donc devant la porte, voit les deux humains dans le lit – le géant assis et Coralie la tête posée sur ses genoux –, en train de parler, puis poursuit jusque dans la cuisine. L'odeur la mène devant le sac, sous l'évier. Avant, elle se serait arrêtée là, déçue. Mais désormais, elle sait ouvrir la petite porte. Une patte bien placée et elle tire. Puis elle se dresse sur ses pattes arrière, posant les autres de chaque côté du sac, et regarde. C'est plein ; d'odeurs et d'ordures. Le truc en plastique est au-dessus, trônant sur son royaume de déchets d'humains. Elle renifle, pour comprendre ce que c'est. Ce n'est pas une odeur dont elle a l'habitude, et elle aime ce qui est nouveau.
Elle tend la patte, pour l'attraper. Un coup, deux coups, et c'est sorti. Il est au sol. Minette tourne la tête, observant son trésor. C'est étrange... c'est gluant, ça sent fort, mais c'est du plastique...

Il y a quelque chose, dedans... on dirait de la « Krem » ; un jour, alors que Coralie se préparait son repas dans la cuisine et qu'elle l'observait, Coralie avait tendu une cuiller, avec une substance blanche, dedans. Minette avait tendu le nez et senti. « Tuveudela Krem ? » avait demandé Coralie, en insistant sur « Krem », ce qui avait permis à Minette de déduire que ça s'appelait ainsi. Elle n'avait pas gouté, et Coralie avait ri. Eh bien, ce qu'il y a dans le truc en plastique, ça y ressemble. Mais sans en avoir l'odeur.

Elle joue avec le truc, un moment, en le tapant, comme si c'était sa souris en peluche. D'ailleurs, au fait, où est-elle passée ? Elle s'en souvient, et même bien, sauf que cela fait longtemps qu'elle ne l'a plus vue. Elle décide de la chercher. Elle fouille le salon, sous le canapé, sous le meuble à images. Mais elle n'est pas là. Dans la chambre, peut-être ? Elle y va, cherche d'abord dans les coins, puis va sous le lit. Elle n'est pas là non plus. Elle entend les humains rire, puis constate qu'ils la regardent. Pourquoi ? Elle préfère sortir ; elle n'aime pas ça. Elle retourne dans le salon, peut-être que la souris est là-bas. Elle cherche partout. Mais non.

Minette est triste. Elle a perdu son jouet. Et puis elle entend le moustique, qui lui zonzonne juste sous le museau. Provocation ? Elle bondit et le claque entre ses deux pattes. Il est mort, Minette est satisfaite ; elle avait bien dit qu'elle l'aurait. Elle bâille, saute sur le canapé, se roule en boule et s'endort.

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